Antonin Artaud, de son vrai nom Antoine Marie Joseph Artaud (4 septembre 1896 - 4 mars 1948) est un écrivain français, auteur de poèmes (L'ombilic des limbes, 1925) et de textes théoriques sur le cinéma et le théâtre (Le théâtre et son double, 1938), dans lesquels il fait l'éloge du « théâtre de la cruauté » et qui influenceront plus tard de nombreux metteurs en scène dans le monde entier. Il a également scénarisé La Coquille et le clergyman et joué dans 22 films en douze ans, notamment dans le Napoléon d'Abel Gance ou La Passion de Jeanne d'Arc de Dreyer.

Artaud est né à Marseille dans le milieu aisé de la bourgeoisie. Son père, Antone Roi, était capitaine au long cours, et sa mère, Euphrasie Nalpas, est d'origine turque. Son enfance est perturbée par des troubles nerveux que l'on attribue à une méningite. Seuls les séjours dans la patrie de sa mère avec sa grand mère le soulagent. La douleur physique ne le quittera plus, malgré des séjours répétés en maison de santé. En 1920, il arrive à Paris et se met à écrire. Son premier recueil est refusé par l'éditeur Jacques Rivière et une correspondance commence entre eux : Artaud lui explique que son écriture est une lutte contre la pensée qui l'abandonne, le néant qui l'envahit. Rivière publiera leurs lettres dans La Nouvelle Revue française.

Le poète devient un moment le directeur de la Centrale du bureau des recherches surréalistes. Au cours de cette période, il écrira des scénarios de films et des poèmes en prose.

Il est aussi acteur chez Charles Dullin où il dessine les costumes et les décors ; puis, à la Comédie des Champs Elysées, chez J. Hébertot. Au cinéma, il est, entre autres, Marat dans le Napoléon d'Abel Gance. Surtout, il fonde avec Roger Vitrac Le Théâtre Alfred Jarry et de 1927 à 1929, il y monte quatre spectacles, dont Victor ou les Enfants au pouvoir de Vitrac. Suivent les textes et manifestes réunis dans Le Théâtre et son double.

L'action au théâtre « révélant à des collectivités leur puissance sombre, leur face cachée, les incite à prendre en face du destin une attitude héroïque et supérieure qu'elles n'auraient jamais eu sans cela. » (Le Théâtre et la peste).

En 1936, Artaud part pour le Mexique et se rend à cheval chez les Tarahumaras pour y trouver « l'antique culture solaire » et du peyotl. Cette quête, écrira Sollers, est « la phase capitale de sa lutte pour faire renaître un corps dans la pensée. »

Un an plus tard, à son retour forcé d'Irlande, il sera interné pour avoir dépassé les limites établies de la marginalité. Il a passé neuf ans interné dans les asiles d'alienés. Cinquante-deux électrochocs vont achever de le briser physiquement. Ses amis obtiennent qu'il sorte de l'asile de Rodez. Il retourne à Paris où il vivra encore trois ans. Pendant cette periode il va produire l'émission radiophonique "Pour en Finir avec le Jugement de Dieu". Il est atteint d'un cancer diagnostiqué trop tard et meurt le 4 mars 1948.

Hypnotisé par sa propre misère, où il a vu celle de l'humanité entière, Artaud a rejeté avec violence les refuges de la foi et de l'art. Il a voulu incarner ce mal, en vivre la totale passion, pour trouver, au cœur du néant, l'extase. Cri de la chair souffrante et de l'esprit aliéné en un homme qui se veut tel, voilà le témoignage de ce précurseur du théâtre de l'absurde (Eugène Ionesco et Samuel Beckett) et de la cérémonie (Michel de Ghelderode ; Jean Genet).

« Nous ne sommes pas libres. Et le ciel peut encore nous tomber sur la tête. Et le théâtre est fait pour nous apprendre d'abord cela. » (A. Artaud)